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Retour sur le rapport déchets CCES de l'année 2021

Il n'est certainement pas trop tard pour revenir sur le "Rapport annuel 2021 sur le prix et la qualité du service public de prévention et gestion des déchets" de la communauté de communes d'Estuaire et Sillon.
 Certes, sa médiocre présentation du 29 septembre en conseil communautaire à Campbon n'en a donné qu'un vague aperçu, avec quelques chiffres égrainés par le vice-président en charge du dossier. Comme de coutume, il n'a été que porté à connaissance du conseil communautaire, 48 h. seulement avant, pour être non-pas adopté ni voté, mais  seulement en "prendre acte", summum de l'anti-démocratie. 
Bien sûr a-t-il été traité de la sorte comme une formalité sans importance, une banale et routinière obligation à l'égard de l'autorité de tutelle, le préfet. A l'évidence son apparence de simple copié-collé des rapports des années précédentes, vise également à donner l'impression qu'il n'y aurait eu, en 2021, rien de nouveau sous le soleil d'Estuaire et Sillon. 

Or, rien n'est plus faux. Les membres du bureau de l'association "Libérez nos poubelles" se sont astreints à sa lecture critique complète. Leurs remarques et échanges -  oralement, par mail et SMS - conduisent à la conclusion que malgré tous les efforts pour cacher les particularités et caractéristiques de l'année 2021 en matière de "gouvernance des déchets" dans l'intercommunalité, cette année apparaît nettement comme un tournant majeur. Parce qu'elle est marquée non seulement par les "nouvelles consignes de tri" ouvrant largement les sacs jaunes aux petits recyclables, mais surtout par le basculement au ramassage par quinzaine, qui n'a pas été sans lourdes conséquences non prévues, ni maîtrisées. 

Année 2021, l'année où tout bascule

Ce n'est qu'en conclusion, que le service admet dans ce rapport - soigneusement noyé dans d'autres considérations annexes et de manière biaisée, que l'année 2021 aura été marquée par : 

 1) "la mise en œuvre et le suivi des nouvelles modalités de collecte", sans préciser qu'il s'agit du passage à la quinzaine pour le ramassage et sans dire un mot sur ses conséquences; 

2) "la révision de la grille tarifaire de la redevance incitative" - avant son application à compter du 1er janvier 2022 - sans pour autant donner un seul chiffre de son % d'augmentation et la réalité de ses effets budgétaires plus que mitigés, comme nous allons le voir ci-dessous.

L'ensemble du rapport est à cette aune. Certes y trouve-t-on graphiques et tableaux. Mais ils sont soient peu commentés, ou s'ils le sont c'est uniquement pour aller dans le sens le la thèse officielle qui est la suivante, elles tient en deux phrases 

"Malgré les économies engendrées par le nouveau schéma de collecte, le produit de RI est insuffisant pour équilibrer le budget."(Rapport 2021, page 32 )

"Les économies réalisées par le changement de fréquence des collectes ont été absorbées par l'augmentation des coûts de traitement" (idem).  

Qu'en termes édulcorés ces choses là sont dites ! Quelles économies pour quel déficit ?Jugeons en mieux à travers quelques extraits des principaux chapitres du rapport et des comparaisons 2021/2020, absentes du rapport, que nous avons ajoutées.

Extraits commentés  du rapport 

CCES, rapport déchets 2021

CCES, rapport déchets 2021

 
Si les déchèteries, avec les déchets verts, recueillent les deux-tiers des déchets, les ordures ménagères ne représentent qu'à peine un cinquième du total des tonnages.

Un ami de l'association s'est livré à ce sujet à la comparaison du tri de 2020 à 2021 :

Comparaison association, sources des données CCES, rapports déchets 2020 et 2021

Le constat est alors identique : d'une année à l'autre, plus d'emballages (sacs jaunes), moins d'OM dans les bacs gris, et un peu plus d'apport en déchèteries. Maintien du tri, mais dégradation des recettes : de 3 millions d'euros en 2020, à 2,5 millions d'euros en 2021. 0.5 million d'euros en moins !


Tout simplement parce qu'avec la quinzaine du ramassage, il y a moins de levées, donc moins de rentrées de redevance.

Qu'en a-t-il été du tri en 2021 ?

CCES, rapport déchets 2021

Constat : Si les ordures ménagères ont augmenté régulièrement depuis 2016, sauf en 2019, leur évolution pour 2021 est nettement à la baisse. Mais l'échelle verticale tronquée, qui commence à 4200 tonnes, accentue fortement ce constat. Et on ne voit pas par quel calcul miracle on arrive à - 41% ?

Le rapport semble donc vouloir accréditer une baisse depuis 2016. Mais il ne dit rien sur cette baisse surtout marquée en 2021. Tout simplement, cette année-là, une partie des OM est assurément passée des poubelles grises aux sacs jaunes, avec le souci des usagers de réduire le nombre des levées et leur facturation. Un phénomène pourtant prévisible qui n'a cependant aucunement été anticipé.

Autre constat : dans le cadre contraint de la quinzaine, cela n'empêche cependant pas une hausse de plus d'un quart des présentations des bacs à la levée.

CCES, rapport déchets 2021

Alors que le passage à la quinzaine était censé accompagner les usagers (particuliers) dans leur diminution des présentations à la levée, on constate l'inverse en 2021 : + 28% par rapport à 2020,  l'année du passage à la quinzaine ! Les décideurs n'ont donc aucunement anticipé non plus le fait que pour beaucoup, attendre un mois avant la levée des OM n'est pas pensable, pour des raisons d'hygiène et de nuisances. 

D'où ce résultat imprévu : ceux qui présentaient leur bac toutes les 3 semaines - ils nous l'ont dit souvent dans notre Audit citoyen - préfèrent désormais légitimement le présenter chaque quinzaine ! Résultat contre-productif au regard du "programme ambitieux" de la CCES.

Quant aux "immeubles", le rapport se garde bien de dire que le plus souvent les syndics des collectifs urbains ont négocié avec la CCES un contrat dérogatoire pour le maintien du passage hebdomadaire.

Pour les "professionnels", face à l'insuffisance du service proposé par la collectivité, beaucoup sont passés à des contrats avec des prestataires privés. La CCES se targue même aujourd'hui de faciliter ce retrait du service "public" (voir bulletin d'octobre 2022).

Ces chiffres parlent, à condition de leur donner à dire ce qu'ils disent vraiment.

CCES, rapport déchets 2021

Une progression différenciée
CCES, rapport déchets 2021

Enfin un constat réaliste. En 2021, alors que le tonnage en déchèteries et dans la collective sélective ont augmenté, celui des OM baisse pour revenir à un niveau d'avant 2016.


Zoom sur l'organisation du service de 2020 à 2021

CCES, rapport déchets 2021

Là, cette fois, le tableau est donc plutôt stable de 2020 à 2021. Mais on remarquera que sur 18 postes, seuls 6 concernent des agents de collecte (chauffeurs et ripeurs) soit exactement et seulement un tiers.


Regards sur le budget [compte administratif 2021]

CCES, rapport déchets 2021

Sur un total de 4 Millions d'euros de dépenses de fonctionnement, ce sont celles issues des déchèteries qui arrivent en tête, avec 41%, les ordures ménagères un peu plus d'un tiers, et le tri sélectif moins du quart. 

La part des coûts de traitement

La CCES voudrait nous faire croire que l'augmentation des coûts de traitement serait la cause unique de ses déboires budgétaires. Le rapport présente les choses ainsi :

CCES, rapport déchets 2021

Si en masse ces coûts ont effectivement beaucoup augmenté (graphique du haut), le tableau en dessous relativise l'évolution de leur poids en %. Car s'ils représentent bien la moitié des dépenses de fonctionnement, la part en % n'a augmentée que de 9%  en six ans et a même diminué un peu en 2022 (budget primitif) par rapport à 2021 (compte administratif). Ce qui ne justifie donc pas d'en faire la seule et unique cause du déficit record inédit de 2021.

L'évolution du budget déchets depuis 2017 

CCES, rapport déchets 2021

Contrairement à ce qui est affirmé comme excuse-explication au déficit nouveau, il n'est pas dû à l'explosion récente des dépenses de fonctionnement : elles étaient, on le voit, plus importantes en 2018 qu'en 2021. Le déficit s'est bien creusé, modérément à partir de 2019, mais surtout en 2021 même, donc surtout du fait de ce qui s'est passé cette année-là (envol des sacs jaunes, +33% reconnus), recul des recettes de levées des OM). La tentative de rapprochement (avec des tirets entourants) entre le résultat net cumulé en 2018 et résultat net de 2021, à part un montant inverse de la somme (environ 600.000 euros, en plus ou en moins) ne suggère rien d'autre que la volonté du service de renouer avec l'excédent que par une forte hausse des tarifs, seule variable d'ajustement admise. Ce qui a été fait en 2022. Maitriser et contrôler mieux ses dépenses, vous n'y songez pas ? Début 2022, il a même été exprimé le projet d'aller vers l'achat d'une très coûteuse benne à propulsion hydrogène ! Qu'en est-il depuis, on ne dit heureusement plus rien de ce luxe incongru en période de frugalité subie.


Des excédents d'avant 2021 au déficit depuis

Source des tableaux, CCES, rapport déchets 2021


Conclusion provisoire

Ce que nous apprend 2021 est très préoccupant pour l'avenir immédiat. En 2021 le budget déchets a été déficitaire de - 626.000 €, pour un budget de 4 M. d'euros soit 15% de déficit. Quelle banque accepterait ça d'une entreprise, ou d'un particulier. Nous continuons de penser que le budget annexe déchets de la CCES mériterait de faire l'objet d'un examen de la part des magistrats de la cour régionale des comptes. Mais, début 2022, le préfet n'a pas répondu favorablement à notre requête en ce sens, se déclarant incompétent en la matière.

Cette fois, le trou a pu être comblé, pour moitié, par ce qui restait des excédents cumulés des années précédentes : 333.000 €. Pour l'année 2022 en cours, la forte hausse des tarifs ( + 64 %) au 1er janvier, visait à rétablir cet équilibre compromis. Mais, cette fois-ci plus de cagnotte conservée des années précédentes ! Comment boucher le trou ? Devinez quoi !

On peut donc craindre et s'attendre au  pire en 2023, avec une nouvelle augmentation des tarifs. D'autant que les décideurs du dossier n'en disent plus rien depuis le tout début de l'année, ce qui n'est pas bon signe du tout. Mais il faudra bien qu'un jour, qui ne saurait tarder indéfiniment, ils parlent. 


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