Le discours déchets de la CCES : un narratif culpabilisateur des usagers.

Le discours officiel sur les déchets au sein de la CCES se reflète dans les bulletins de l'intercommunalité, en partie repris dans certaines municipalités, ainsi que dans les rapports annuels et les lettres d'information du service déchets. Ce narratif est également entendu par bribes lors des conseils communautaires, où le président et le vice-président s'expriment, ainsi que lors des vœux de la CCES. Il est élaboré lors des réunions à huis-clos de la commission déchets et du conseil de régie, lorsqu'il se réunit. Si les expressions sont prolixes et répétitives sur le tri et la collecte, elles se font beaucoup plus discrètes concernant le traitement des déchets, qui est confié au SMCNA, où siègent pourtant des élus de la CCES.

En fait, ce discours n'a rien d'original ou de particulier. Fortement inspiré par l'ADEME*, ou CITEO*, on le retrouve copier-coller presque mot à mot dans la bouche de tous les élus engagés dans les collectivités suivant les mêmes orientations (Redevance incitative, PAV [points d'apport "volontaire"], biodéchets, réduction de la fréquence des collectes, etc.), même si c'est selon des modalités particulières de détails dans chacun des cas.

En résumé, en faisant une synthèse des propos lus et entendus ici localement, tous les problèmes sont imputés aux usagers, estimés insuffisamment "vertueux" et pas assez "éco-responsables". Une "pédagogie", insistante et pesante, rebaptisée "prévention", est donc jugée nécessaire pour les "sensibiliser". Les élus se présentant volontiers eux-mêmes,  à l'occasion, comme étant personnellement des modèles de vertu en matière de tri.

Les "dépôts sauvages" sont perçus comme des actes d'incivilité, sans lien à chercher et établir avec les dysfonctionnements du système. Si les factures augmentent, c'est qu' elles sont impératives pour "sauver la planète". Malgré les fréquentes modifications des consignes, le tri reste présenté comme "un jeu d'enfant". Le barème tarifaire doit privilégier la "part variable" (les levées) par rapport à la "part fixe" (l'abonnement) pour inciter les usagers, jugés atteignables uniquement par des motivations de porte-monnaie et de budget personnel.

Les "erreurs de tri" des usagers - désignés comme "producteurs de déchets" sur leurs factures - sont blâmées pour créer le déséquilibre budgétaire. Le budget annexe des déchets de l'intercommunalité doit être présenté et voté "à l' équilibre", et seule l'augmentation des tarifs permettrait d’y parvenir, surtout pas une meilleure maîtrise des dépenses.

Adopté en 2014, le principe de la "redevance incitative" - rebaptisée depuis redevance déchets - n'a pas à être remis en question. Les usagers n’ont pas voix au chapitre, considérés comme incompétents pour évaluer l'ensemble du système, et les réunions publiques sont jugées inefficaces donc inutiles. L’évaluation des dispositifs et leurs modifications reviennent ainsi exclusivement à la commission déchets, un comité Théodule, ou à des bureaux d’études chèrement payés pour cela.

Cependant, plus on parle d'"harmonisation", d'"optimisation" ou de "rationalisation", plus le système montre des signes de dysfonctionnement. Tandis que l’intercommunalité se concentre sur la collecte, le SMCNA, responsable du recyclage et du traitement, reste silencieux sur ses choix, projets et perspectives à cet égard. En revanche, son président met volontiers en avant l' "économie circulaire", tout en désignant lui-aussi l’usager seul comme le responsable central des difficultés rencontrées.

Bref, le "narratif" déchets de la CCES - son "Storytelling" (racontage d'histoires) sur sa "gouvernance" du tri et de la redevance (dés)incitative - apparaît de plus en plus déconnecté des réalités, inefficient, éloigné des attentes des usagers de ce service public.

"Storytelling" ? = un racontage d'histoire(s)

Oui, il faut voir comme ils nous parlent, ils nous parlent. Ils nous ADEMEisent, ils nous CITEOisent, ils nous SMCNAisent. 

* Voir notre page Abécédaire sur ce blog

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